lundi 9 février 2009

UN TISSU : DES PROPORTIONS UN GALON


Nom de code: 33858. Chez Chanel, il correspond à une petite veste noire, issue de la pré collection automne-hiver 2008. Précollection, car elle fait partie de ces premiers vêtements de saison mis en vente avant la fin de l'été. Une période où l'on pense doucement à la rentrée, avec des envies de tenues basiques à porter sans réfléchir tout au long de l'année. La petite veste noire parfaite, par exemple. Celle qui nous accompagnera du soir au matin, sur un jean comme avec des escarpins.

C'est en pensant à ce vêtement fétiche que Karl Lagerfeld a décidé de distinguer, chaque saison, « la » veste Chanel du moment. Jamais vraiment la même dans ses proportions, son tissu, son galon ... Celle de l'hiver 2008 est noire, plutôt classique avec quatre poches boutonnées.

L'idée est aussi d'exploiter le formidable potentiel de cette icône de la griffe, une légende, presque un monument national! Car cette veste, c'est évidemment celle du tailleur Chanel, inventé par Mademoiselle en 1954, alors qu'elle faisait un retour fracassant dans la mode. Depuis 1983, Karl Lagerfeld s'amuse à la bousculer - et parfois même à la dynamiter-pour mieux le faire exister. La preuve, en 1985, il l'associe pour la première fois à un jean, combinaison devenue un classique.

En 1992, la veste est en éponge, en 1994 en fausse fourrure, puis en Néoprène pour devenir veste de plongée. Elle se porte avec un short, une robe, un pantalon ... une petite culotte. Le créateur a une tendresse particulière pour ce vêtement dans lequel il reconnaît une veste autrichienne. « Il y a des choses qui ne passent jamais de mode, le jean, une chemise blanche, une veste Chanel », dit-il. Digne héritière de la griffe, elle porte toujours en elle l'ADN de la maison, jusque dans ses moindres détails.

Plonger dans ses secrets de fabrication, c'est découvrir que la légende ne doit rien au hasard. Il est ici question d'histoire, de savoir-faire, de mode de vie. « Un tailleur Chanel est construit pour une femme qui bouge », disait Coco. Celle qui s'est fait connaître avant-guerre avec ses tenues de jersey, souples et confortables, ne déroge pas à son principe des années plus tard. Dans les années 50, les femmes se sentent belles dans les sublimes tailleurs sculpturaux - et très rigides – de Christian Dior. Les guêpières américaines leur taillent les seins en obus. Chanel donne un coup de pied dans la fourmilière en faisant défiler rue Cambon ses tailleurs en tweed souple et mou, avec jupe fendue pour donner plus d'aisance. Pratique, décontracté, confortable. Les Américaines, déjà sportswear, adorent. Les Françaises détestent. Avant d'y n succomber, dès la deuxième saison! Romy Schneider contribue à tisser la légende en endossant le tailleur dans le film «Boccace 70 », Chanel ne pense pas seulement aux vêtements, mais aux bouleversements sociaux de l'époque. Elle invente une tenue pour la vie active, pratique comme un vestiaire masculin, la désinvolture et l'élégance féminine en plus, le confort en prime.

CONCUE COMME UNE SECONDE PEAU

La veste du tailleur est conçue comme une seconde peau.

Elle bouge avec celle qui l'habite, Elle est droite, structurée, fermée bord à bord. Pas d'entoilage, pas d'épaulettes: de la souplesse! On rappelle que Mademoiselle prenait les mesures de ses clientes en leur faisant croiser les bras sur les épaules. La tenue réside dans la coupe. Jean-Philippe, premier d'atelier rue Cambon, explique:

« L'étoffe est coupée dans le droit-fil. Les pièces, seize au minimum, sont assemblées les unes aux autres par des coutures verticales au plus près du corps. » Les coutures droites comme des « i », ajustées au millimètre près. Pas de pince poitrine, les volumes sont absorbés par la coupe savante des lais de tissus verticaux. La ligne générale est tendue et rectiligne. L'épaule toujours droite. Le tweed souple est intimement lié en de multiples points avec sa doublure de soie pour ne faire plus qu'un.

Le temps n'aura pas de prise sur ce couple. Au bas de la veste, une chaîne leste l'ourlet pour un tombé parfait. L'encolure maison est ronde. Les manches sont fendues pour pouvoir les retrousser. En 2008, elles sont très étroites, ainsi l'a voulu Karl. L'atelier a reçu un matin le dessin de la 33858.11 a fallu dix jours de travail et quelques allers-retours avec le studio de création pour interpréter avec justesse les traits de crayon du maître. Premier d'atelier, directrice du studio, patronnier, coupeur, toiliste, couturières, modéliste ont donné vie au croquis en choisissant le tissu adapté - un tweed de laine, noir-les boutons, le galon, ici en mohair brodé de perles noires. Le modèle existe en noir, marine et bordeaux.

Le prix du rêve: 2 930 euros.

 La veste est matérialisée en toile de coton à partir du dessin de Karl Lagerfeld. Une fois le modèle arrêté, les pièces de tissu sont coupées et assemblées. Le bas de la doublure reçoit une chaîne, jolie astuce pour lester l'ourlet et obtenir un tombé parfait.

Le couturier et son bras droit Virginie Viard, approuvent.





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